IL FAUT EXIGER LES RESPONSABILITÉS POLITIQUES

La photographie d’Oscar Pérez est devenue connue dans le monde entier, lorsqu’il a été percuté et emprisonné entre deux voitures de police lors d’une manifestation «non autorisée» sur la Plaza Italia, baptisée par le mouvement social, le 18 octobre, Place de la Dignité, ce qui lui a provoqué de graves blessures.

Nous avons également vu le déploiement de plus d’un millier de policiers pour empêcher cette manifestation et les déclarations du gouverneur, Don Felipe Guevara, sur le fait que «nous n’avons pas de manifestation autorisée à cet endroit, et donc il n’est pas approprié qu’il y ait une manifestation».

Nous pensons que c’est la meilleure expression du régime que nous vivons, d’une illégalité et d’une violence absolues. Le gouverneur avec un niveau d’ignorance incontestable souligne qu’au Chili, il ne peut y avoir que des manifestations autorisées. À vrai dire, la Constitution des années 80, fondée sur ce qui est énoncé dans la constitution de 1925 garantie que les gens ont le droit de se réunir sans autorisation préalable, pacifiquement et sans armes. Et c’est le contenu exact du droit de réunion: se réunir sans armes et sans autorisation préalable.

Certains soutiennent que le droit de réunion entre en conflict avec la liberté ambulatoire des personnes. Cela n’a rien à voir. Les deux sont séparés depuis au moins 150 ans. Et en réalité le droit de se réunir sans autorisation préalable existe. Ce qui se passe, c’est que lorsque vous occupez la rue et parcourez les artères, vous devez établir un certain niveau de réglementation. Et les municipalités ont le devoir de réglementer l’utilisation de l’espace public. Mais aucune réglementation n’est un droit supérieur au droit constitutionnel de se réunir sans autorisation préalable. Ensuite, le gouverneur, Felipe Guevara prend une décision politique absolument illégale et inconstitutionnelle qui devrait le conduire à une démission forcée, car il agit en dehors des cadres de la loi et de la Constitution des années 80. Et son ordre d’empêcher à tout prix la manifestation à la Place de la Dignité est un acte constitutif d’inconstitutionnalité flagrante, qui sanctionne le septième article de la Constitution de Pinochet susmentionnée. Sa décision d’empêcher la manifestation s’est transformée en acte criminel inductif.

Nous avons vu que certaines organisations de défense des droits de l’homme soutiennent que les auteurs matériels et les hauts commandements policiers en charge de l’opération doivent être destitués et sanctionnés. Ils ont raison, mais à notre avis, il y a une responsabilité politique directe qui porte un prénom et un nom: le gouverneur de Santiago, qui a donné l’ordre inconstitutionnel et illégal d’interdire l’organisation d’une manifestation.

Quelle est l’origine de cette idée qui exige une autorisation pour les manifestations? En effet, l’état d’exception constitutionnelle permet de restreindre le droit de réunion et, par conséquent, les manifestations sont interdites. Pendant toute la période de la dictature, nous avons vécu dans un état d’exception permanent: état de guerre, état de siège, état de danger de perturbation de la paix, qui a établi la disposition transitoire No. 24. Et durant ces années de dictature, nous avons dû nous habituer à demander la permission de manifester, qui ne s’applique que lorsqu’il y a un état exceptionnel. On constate que le gouverneur est resté coincé dans la dictature.

Mais de manière naturelle et normale, le droit de se réunir sans autorisation préalable prévaut et la responsabilité politique de l’empêcher illégalement et inconstitutionnellement appartient au gouverneur. Cette responsabilité doit être exigée. De plus, lorsqu’en réalité il y a une répression excessive, orchestrée, systématique et dirigée contre la population. Balles, gaz lacrymogènes et eaux contaminées du char lance-eau qui, lorsque des produits chimiques sont ajoutés, ont pour but d’aggraver la douleur et blesser les manifestants à cause du simple fait de manifester.

Les rapports internationaux qui condamnent le gouvernement chilien sont connus et lorsqu’ils ont fait référence à la politique de contrôle des manifestations destinée à nuire à la population a provoqué des niveaux d’irritation importants des autorités, mais aujourd’hui, nous constatons que la politique répressive a précisément cet objectif qui lui donne un clair profil autoritaire.

Hiram Villagra Castro
Avocat en droits humains, membre du conseil d’administration du CODEPU.
21 décembre 2019.